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L’Avenir du Rhododendron

    QUEL EST L’AVENIR DU RHODODENDRON.

    Vers quelle évolution va-t-on assister ces prochaines années ?

    C’est à la fois simple et compliqué.  Sans faire de philosophie on peut dire que l’homme est un éternel insatisfait et qu’il possède dans ses gènes le besoin d’améliorer tout et toujours. L’homme est ainsi et cela s’appelle le progrès. On peut le déplorer certaines fois mais il est vain de lutter contre cela.

    Qu’en est-il pour le rhododendron ?  Depuis à peu près deux siècles, semis après semis chacun s’emploie à améliorer cette plante selon des critères personnels. Les efforts des uns sont concentrés sur les inflorescences quand ceux d’autres travaillent sur la plante toute entière.

    Première évidence : la marge de « manœuvre » pour améliorer les espèces est réduite comme peau de chagrin.  La Nature le fait depuis des dizaines de milliers d’années et, si j’admets qu’il est possible de faire mieux,  je suis intimement convaincu que cette amélioration ne peut être que marginale et ce pour un travail colossal.  Si je prends pour exemple l’espèce qui a pour nom R. macabeanum, je veux bien admettre qu’il est possible de sélectionner une forme qui soit encore plus « belle » que la plus belle actuelle mais ce ne sera qu’un petit plus. Posez-vous la question : combien de plantes faudra-t-il élever et pendant combien d’années pour sélectionner cette forme supérieure ? Non, l’avenir du rhododendron n’est pas dans les espèces car l’amélioration qui ne peut se faire que par la sélection y est sinon impossible, du moins presque ridicule et difficilement quantifiable.

    Deuxième évidence : environ trente mille hybrides ont été enregistrés en disons 150 ans. Ce chiffre est énorme et reflète un intérêt pour l’amélioration des rhododendrons. Les premiers hybrideurs avaient le champ libre : tout était sujet d’émerveillement et à chaque hybridation c’était le jackpot. Ce n’est plus le cas de nos jours où le « marché de la création » est saturé. Quand il existe des milliers de fleurs avec une corolle spottée il est difficile, voire impossible, d’émouvoir les gens avec quelques points sur la vôtre. Je suis intimement convaincu que des merveilles sortiront encore de ce marché saturé mais ce sera au compte-goutte : beaucoup d’appelés, mais peu d’élus.  Est-ce à dire que l’avenir du rhododendron est dans le rétroviseur ?

    Non, et je veux que vous en soyez persuadé.  Un champ d’exploration tout nouveau a été créé il y a quelques années : la polyploïdie. Un laboratoire portugais, l’Université de Coimbra au Portugal, sous l’impulsion de l’Américain John Perkins, se charge gratuitement de faire les analyses scientifiques depuis 2011. Ces analyses ont permis de savoir quels rhododendrons étaient polyploïdes et quel était leur niveau de polyploïdie.  Ces rhododendrons polyploïdes sont en nombre infinitésimal par rapport aux rhododendrons diploïdes.

    Qu’apporte la polyploïdie ? Sans entrer dans les détails et pour faire simple, elle multiplie par 1.5 ou 2 toutes les caractéristiques d’un diploïde.  Le rhododendron Nancy Evans est diploïde, le rhododendron Horizon Monarch issu de Nancy Evans est tétraploïde, voyez-vous la différence ? Non ? Vous ne connaissez pas ces rhododendrons ? Alors disons qu’il y a la même différence entre un diploïde et un polyploïde qu’entre moi  et Schwarzenegger et ce de façon naturelle.  En effet ce ne sont pas des organismes génétiquement modifiés : tout est naturel. Il faut savoir que les rhododendrons sont diploïdes (2 jeux de chromosomes) mais que Mère Nature fait certaines fois des erreurs, ce qui est somme toute excusable sur des dizaines de milliards de fécondations. Ainsi apparaissent quelquefois des triploïdes (3 jeux de chromosomes), plus souvent des tétraploïdes (4 jeux de chromosomes) ou, exceptionnellement, des pentaploïdes (5 jeux de chromosomes).

    L’avenir du Rhododendron

    L’Université de Coimbra a donné un formidable outil aux hybrideurs : ils peuvent maintenant créer des polyploïdes en parfaite connaissance de cause simplement en utilisant ceux créés par les erreurs de la Nature.  Concrètement cela signifie qu’il est possible d’appliquer le coefficient multiplicateur de 1,5 à 2 à TOUS les hybrides. Vaste programme s’il en est !  Pour le moment il n’y a pas de recul pour savoir ce que peuvent donner plusieurs générations de polyploïdes croisés entre eux. Des rhododendrons atteints de gigantisme ? Plus résistants aux maladies ? Est-ce que le parfum ne sera pas renforcé chez les polyploïdes ?  Une chose est certaine : prenez un rhododendron diploïde qui vous plait, hybridez-le avec un polyploïde choisi avec soin et vous obtenez un polyploïde qui ressemble au diploïde mais en version « bodybuildée ».

    Démonstration en a été faite par Ned Brockenbourgh qui a croisé Nancy Evans avec Point Defiance et obtenu Horizon Monarch.

    Marc-Colombel

    Photo prise par Ned Brockenbrough chez lui devant un Horizon Monarch

    Une autoroute est devant les hybrideurs qui se lancent dans la polyploïdie. C’est le deuxième étage de la fusée « hybridation » qui vient de s’allumer.  Les autres pays n’ont, pour le moment, pas pris en compte l’importance de ce nouveau « terrain de jeu ». Ned Brockenbrough est le seul, à ma connaissance, à continuer dans cette voie.

    Nous sommes quelques-uns (trop peu encore) à avoir des centaines de semis de polyploïdes qui commencent à fleurir ou vont fleurir dans 1, 2 ou 3 ans.

    Marc Colombel 2014

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