Conférence : Mettre en œuvre une palette végétale adaptée face au changement climatique par Philippe Lepère
Compte-rendu de la conférence
Titulaire d’un BTS en pépinière et d’une maitrise en aménagement paysagé, Philippe Lepère a enseigné à l’école d’horticulture et du paysage de Saint Ilan dans les Côtes d’Armor. Puis il a développé la Pépinière La Palette Végétale, située sur les bords de Loire à Bréhémont, à 30 km de Tours environ.
Les plantes qui y sont cultivées sont sélectionnées avec beaucoup de rigueur pour leurs valeurs ornementales et leur rusticité. Les plantes rares y côtoient les végétaux plus classiques, l’objectif étant leur bon comportement au jardin et la réalisation d’associations végétales raffinées. La Palette Végétale produit maintenant environ 30.000 godets de plantes vivaces et 2.800 conteneurs d’arbustes.
Intervention Balades et Jardins
« Mettre en œuvre une palette végétale adaptée face au changement climatique »
INTRODUCTION
L’impact de plus en plus prégnant du changement climatique a fait évoluer la gamme des végétaux disponibles selon plusieurs facteurs dont les deux principaux sont les suivants :
1. Des hivers moins rigoureux rendent possible l’utilisation de plantes moins rustiques (Agapanthes en Touraine) et certaines plantes auparavant utilisées comme des annuelles sont maintenant considérées comme des vivaces (Dahlia)
2. Des températures élevées dès le mois de mars jusque fin septembre avec des périodes de sécheresse et des canicules de plus en plus fréquentes nous obligent à rechercher des végétaux moins gourmands en eau et résistants à la sécheresse.
Les axes de recherche pour faire évoluer la palette végétale
1. Observer et répertorier les végétaux existants les plus résistants et leur situation.
* Miscanthus : les variétés à feuillages fins résistent mieux à la sécheresse
* Ex ‘Gracillimus’ – ‘Yakushima Dawrf’ – ‘Adagio’
* Panicum à feuillage bleuté ‘Prairie Sky’
2. Réhabiliter les plantes oubliées ou délaissées : ce sont souvent des plantes trop utilisées dans les années 60-70 avec une forte connotation lotissements et grands ensembles
* Hypericum calycinum – Bergenia cordifolia
* Vinca minor
3. S’intéresser aux modes de végétation et les adaptations naturelles développés par les plantes « dormance estivale » activité végétative en automne, hiver et tout début de printemps
* Ex Helleborus orientalis Origine forêt Bulgarie, Grèce, Caucase, Turquie (résiste bien en plein soleil)
* Euphorbia robbiae
* Epimedium sp.
* Vinca
* Bergenia cordifolia
4. Opter pour des feuillages gris et tomenteux
5. Choisir des végétaux avec présence de racines (rhizomes) et tiges charnues (tubercule), organes de réserve qui assurent la survie des plantes pendant la saison d’hiver ou les périodes de sécheresse. Comme les bulbes et autres organes de conservation
* Ex Liatris spicata (bulbeuse Est et Sud des USA)
* Parmi ces plantes, nombreuses sont celles qui peuvent avoir un aspect ornemental « dégradé » en cas de conditions climatiques extrêmes. Mais elles possèdent la faculté de très vite se régénérer dès les premières pluies. On peut parler de plantes à forte résilience.
6. Rechercher de nouvelles plantes en s’intéressant à deux facteurs.
* Origine géographique
* Milieu naturel
7. Rechercher de nouvelles espèces et variétés de plantes déjà utilisées.
* Rudbeckia
* Stachys
CONCLUSION
Rappel de physiologie végétale : Les plantes sont essentiellement constituées d’eau, leur teneur en eau variant de 80 à 95 % de leur poids total.
Les plantes « molles » c’est-à-dire non ligneuses dont font partie les plantes vivaces ont la plus forte teneur en eau. Par ailleurs elles n’exploitent pour la plupart que les 30 premiers cm du sol. Elles sont donc beaucoup plus sensibles à la sécheresse des sols. C’est encore plus vrai dans les sols peu profonds et tassés.
La présence des trois strates de végétation devient importante et peut renforcer la résistance des plantations à la sécheresse et surtout aux épisodes caniculaires
Il devient nécessaire de modifier nos habitudes et nos pratiques au regard de cette situation.
Réduction des surfaces de fleurissement au sens traditionnel (gestion différentiée des espaces verts)
Penser végétalisation et verdissement avec une gamme de plantes moins ornementales et en introduisant les plantes endémiques.
Adapter le type de plantation et la gamme des végétaux aux situations et usages. (îlots de verdure, zone de fraicheur, plaine de jeux, repos et loisirs)
Privilégier arbres et arbustes capteurs de CO2, plus résistants à la sécheresse et pourvoyeurs de fraicheur. (interception des rayons solaires, évapotranspiration, amélioration de la gestion des eaux pluviales et de la qualité de l’air)
Plus que jamais respecter les bonnes pratiques de plantation (périodes de plantation, préparation des sols, paillage) et d’entretien
Prévoir un suivi des plantations sur 2 ans pour les vivaces, 3 ans pour les arbustes et 4 à 5 ans pour les arbres.
Date : 10 décembre 2022