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Le Jardin de Didier Willery

    Visiter un jardin qu’on ne connait absolument pas, même en photo , est un moment troublant….

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    Une belle gelée blanche et un soleil timide ont constitué un premier comité d’accueil pour ce jardin situé à

    l’extrémité du pays minier, et face à la campagne.

    D’une superficie de 2500 m2, créé entre 1990 et 2000 avec l’aide de Pascal Garbe, qui œuvre au sein des

    jardins Fruitiers de Laquenexy.,ce jardin est celui d’un fou de plantes , et a été conçu comme un décor pour

    photographier les associations de végétaux .

    Une ligne médiane structure visuellement un lieu grosso modo rectangulaire , qui s’est peu à peu constitué par l’achat de petites pièces de terre . On y accède par un ensemble de bâtiments (maison d’habitation et petites resserres et remises), répartis autour d’un système de terrasses et de jardinets presque informels , dont les végétaux se faufilent entre les graviers, se mélangent, se font valoir les uns les autres. Une fausse sauvagerie, établie sur un support de remblais, la terre ne compte pas pour beaucoup dans ces plantations d’hellébores de Corse, stipa tenuifolia, thyms, sedums et bambous . On trouve d’ailleurs une douzaine d’espèces de bambous, bien maîtrisés grâce à une taille annuelle d’un tiers des tiges (ensuite broyées, et utilisées comme barrière anti-limaces ou mises au compost). Eclaircir les bambous de cette manière ralentit leur pousse, un peu d’arrosage et de nourriture font le reste (eh oui, les bambous sont comme nous ! ils ont faim, et ils cherchent leur nourriture de plus en plus loin si leur frigo est vide …..nourrissez les un peu, ils resteront à la maison !)

    Didier considère son jardin aux innombrables plantes comme une passerelle, une espèce de laboratoire où son savoir, sa logique et sa fantaise l’amènent à des essais de culture, de taille, d’associations végétales, et sont les points de départ de l’écriture de ses livres et le support de leurs illustrations.

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    Par exemple, il ne taille ses pommiers cordons qu’en vert et 4 ou 5 fois dans l’été (toutes les tiges nouvelles de la taille d’un crayon sont coupées au-dessus du premier bourgeon) , et ils sont complètement interplantés d’aromatiques, ellébores, geranium, et autres.

    Didier teste aussi les pommiers colonnaires, qui ne nécessitent aucune taille, version idéale de l’arbre fruitier pour les petits jardins ! Ils voisinent avec des groseillers, des caseilliers, et là encore, le sol est planté desnombreuses herbacées. Chaque petite chambre de verdure réserve ses surprises, styles différents , familles de végétaux différentes, et Didier nous « fait voir » par des gestes et des descriptions abondantes ce que sera le décor au long des saisons.

    Et on le « voit », ce décor ! On imagine le nuage rose de la floraison de Calamagrostis ‘Overdam’ unifiant les plantations de la petite prairie fleurie (euphorbes, hellébores, des bulbes à foison, asters, buddleias, cotinus, spirée salicifolia, il y en a tant qu’il ne peut plus ajouter de plantes que petites, pour ne pas avoir à faire un trop grand trou ….). On voit déjà le décor de pivoines, stachys, stipas …. du potager . La petite mare logée … dans un toit d’estafette (jardiner, c’est recycler !!!) sera bien fleurie dès le printemps. Près du potager, un petit verger où le pied des fruitiers est entouré de carrés d’herbe qu’on ne tond pas : au printemps, l’herbe courte ne gêne pas l’arbre dans son absorption des nutriments et de l’eau de pluie nécessaires à la fabrication de la sève montante ; la saison avançant, l’herbe poussante ne gêne pas l’arbre qui a désormais besoin de sève élaborée obtenue grâce à la photosynthèse. Et en plus … cela crée un décor à la fois raffiné et champetre.

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               Plus loin, un autre bassin est entouré de crinums et de fougères. En automne, les frondes des secondes,

    laissées sur place, serviront de protection aux bulbes des premiers ….

    On se glisse au travers de haies, hautes ou basses, qui jamais n’enferment mais marquent simplement des

    transitions entre des ambiances ou servent d’appui et de mise en valeur à d’autres végétaux, on arrive au

    délicieux petit poulailler dont les occupantes, assez timides, n’ont pas souhaité nous dire bonjour, et on

    remonte vers le jardin blanc protégé par un angle de murs, et qui comporte 3 points d’eau ronds dont les

    tracés sont brouillés par la multitude de petits couvre-sols qui se prélasse là pour accompagner des lianes et

    En bas du terrain, une grande « respiration » ronde de gazon fait la transition avec la campagne mitoyenne par

    une haie variée, une chaise est là, prête à accueillir le jardinier rêveur …..

    Il est difficile (enfin … il m’est difficile !) de, tout à la fois, savourer un endroit, écouter son créateur, noter ce

    qu’il dit et prendre des photos …. Je n’ai noté que quelques noms de végétaux :

    Syringa meyeri ‘Palibin’ , naturellement court et rond

    Prunus feketeana , à forme pleureuse

    Ribes sanguineum ‘White icicle’

    Osmanthe burkwoodii pour faire des topiaires (à tailler fin juillet pour avoir des fleurs au printemps suivant)

    Bergenia ‘Sunningdale’ (pourpré à fleurs très roses et assez hautes)

    Hamamelis x intermedia ‘Aphrodite’

    Hemerocallis ‘Golden Zebra’ à feuillage panaché et petites fleurs orangées

    Stachirus praecox au feuillage panaché et floraison blanche

    Je me suis laissée aller à savourer l’accueil chaleureux et généreux de Didier, à respirer son jardin, m’amuser de mille petits détails, admirer un savoir-faire qui semble si simple ! La maison s’entoure de ses jardinets et terrasses, puis le terrain déroule ses coins et recoins ….. on pourrait résumer notre visite à cela ….. et pourtant , au-delà des …milliers (?) de plantes qui vont tour à tour se développer , je garde le souvenir de ces successions de jardins dans le jardin dans une harmonie sereine en cette fin d’hiver, mais qui va exploser de coloris et de végétation dès le printemps.

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    Nicole Marillier  2 mars 2014